à petits pas
Les gens qui ressentent un besoin, par exemple de changement, visent souvent un objectif de changement tellement radical qu'ils se donnent là la meilleure raison de ne jamais changer : "C'est trop dur, c'est trop lourd, ça implique trop de choses, ça concerne trop de gens ou d'aspects de ma vie, donc je ne change rien !"
C'est pourquoi il est précieux d'inviter l'autre ou de s'inviter soi à se dire : "Quelle est la plus petite chose ou la chose la plus agréable, même petite, que je pusise dire ou faire et qui aille dans le sens du besoin que j'ai identifié ?"
Non pas la plus grande chose, mais la plus petite, non pas le plus pénible mais le plus agréable. Cette question surprend souvent les personnes, parce que notre esprit, habitué aux performances et entraîné aux résultats, cherche l'épreuve à laquelle se mesurer, cherche le challenge d'un enjeu de taille. Comme si la réalité n'était pas faite de toutes petites choses tissées avec d'autres toutes petites choses et d'autres toutes petites choses encore qui peuvent faire ensemble de très grandes choses.
Cet aspect modeste et réaliste de la demande suscite souvent des doutes à une époque régie par l'automatisme des déclics : téléphones, télévisions, électroménagers, voitures, ordinateurs. Nous changeons de spectacle, de programme, d'interlocuteur et de vitesse par un seul déclic ! Accepter l'humilité et la lenteur du processus vivant est si peu habituel que beaucoup trouvent cette attitude peu naturelle. Et pourtant !
Thomas d'Ansembourg, Cessez d'être gentil, soyez vrai ! - Les Editions de l'Homme, 2001
~
Non, je ne touche rien de ce monsieur à la fin du mois, je le jure ;)
Là je n'ai pas pu m'empêcher de reprendre cette partie... Il n'y a donc pas que les écologistes et autres aventuriers de la simplicité volontaire qui plaident pour les petits pas, tout en mettant en évidence le plaisir qu'on peut retirer de leur mise en pratique.
C'est comme ces livres que l'on dévore parce que le sujet est fascinant et que l'auteur le traite d'une plume enlevée. N'avez-vous jamais regretté d'arriver trop tôt à la dernière page ? Mes meilleurs souvenirs de lecture correspondent aux ouvrages que j'ai dû lire par petites touches, je me rappelle l'ambiance des scènes décrites, quelques particularités d'écriture, l'odeur des pages...
Souvent j'assimile la vie à un chemin que l'on parcourt. On peut marcher en plaine, parfois cela descend doucement, sous une légère brise et le parfum des fleurs sauvages. D'autres fois il pleut et il vente. Il arrive que certains passages soient escarpés. Et quand le brouillard s'y met, alors, les amis, vous lirez une prose torturée par ici ;)
J'ai mis 32 ans à l'accepter, mais aujourd'hui il me paraît clair que chaque rocher, chaque pente, chaque nuage, est important sur ce chemin. Je peux pester de n'y voir goutte ou de glisser, il me sera impossible d'accélérer. Accélérer pour quoi d'ailleurs ? "Atteindre plus vite mon but" aurais-je rétorqué il y a quelques mois. Ce qui est intéressant comme réponse, mais qui occulte toutefois que des buts ultimes, j'en déjà atteint une dizaine, dans ma vie !
Vous savez ce que je crois ? Je crois que le but de ma vie ne se découvrira que lorsque celle-ci prendra fin. Seulement alors m'apparaîtra, peut-être, le sens que je lui aurai donné. Le sens... un même mot pour dire "signification" et "direction"...
Je n'arrêterai jamais de cheminer, il n'est pas question d'atteindre mon but plus rapidement pour me reposer ensuite. Je mettrai toujours un pied devant l'autre, et chaque jour j'essaierai d'aller dans la direction que m'indiqueront les étoiles. Je n'arriverai peut-être jamais à destination de mes rêves... Et cela ne me remplit pas de tristesse. C'est mieux ainsi. Ce qui compte, c'est le chemin, et la façon unique que j'aurai de le parcourir. Ce qui compte, ce sont tous ces petits pas, et les moments de grâce qu'ils m'auront accordé.