avec une grande hache

Publié le par Caco

Hier Mamzelle est tombée par hasard sur une photo de couverture, à la une d'un de ces journaux qu'on s'était promis de dissimuler sous le lit. Honteux du quotidien de nos frères humains, sans mots devant l'horreur, saignant de tout mon coeur de maman à chaque enfant meurtri.
"Qui c'est ça Maman ?"
"C'est un petit garçon qui est tombé."
Evidemment l'expliquation ne lui a pas suffi. On ne tombe pas de dessous la terre et les gravats. Il ne suffit pas d'une simple chute pour se retrouver le visage tuméfié, les cheveux gris de poussière et la peau striée de rouge. Elle a voulu revoir, j'ai prétexté que je voulais lire. Que de toute façon je ne savais pas vraiment ce qu'il s'était passé.
Et c'est vrai. Je me tiens soigneusement à l'écart, depuis toujours, de ces images qui me savent me poursuivre dans mes nuits de fièvre glacée. Tourner le dos à la réalité pour tenir encore un peu le bonheur désespéré de voir les fleurs pousser. Jusqu'à ce qu'elle me rattrape, derrière ce mot, ce mot qui ne dit rien, ce mot qui assourdit, ce mot qui nous entoure et nous englobe, que l'on brandit comme un privilège, que l'on fête ou que l'on déplore, et dont je finis par avoir honte. Ce mot que l'on a doté d'une grande hache, d'un côté ceux qui conquièrent en exterminant leurs semblables, de l'autre ceux qui se défendent en exterminant leurs semblables, ceux qui se dotent de droits pour que tout cela cesse, se gardant celui de les maintenir en exterminant leurs semblables, ceux qui cultivent leur jardin, esclaves d'un système qui extermine leurs semblables, ceux qui luttent avec des mots pour ne pas avoir à exterminer leurs semblables, ceux qui entrent en résistance pacifique et mordent tous les jours la poussière de l'anormalité, du décalage social et des difficultés qui s'amoncellent.
Et ceux qui se cachent pour pleurer...

Publié dans les yeux ouverts

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P
<br /> <br /> <br /> Il n’est pas indigne de se cacher pour pleurer. Mais il faut pouvoir ressortir pour rejoindre « ceux qui entrent en résistance pacifique », ceux qui agissent au quotidien dans des réseaux, familiaux, amicaux, associatifs. On ne lâche pas prise. On réinvente des modes de lien et d’engagement (voir les blogues, les actions d’information et de soutien par Internet).<br /> <br /> (Je ne regarde plus les JT)
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C
<br /> Cécile : ...<br /> <br /> Copenhague : Les images marquent plus que les mots, enfin, chez moi aussi en tous cas...<br /> <br /> Bergere : Tout pareil que toi, pour le 20 heures ! Au moment des cours d'éco, c'était BFM (halala), les Echos et Alternatives économiques...<br /> <br /> PMB : Il faut, il faut... je ne suis pas d'accord. Même si, par ailleurs, vous décrivez là exactement ce que je fais. Mais le prescrire à mon entourage, non : ce qui me correspond, qui fait sens<br /> pour moi, c'est quelque chose qui m'appartient. Je le partage avec d'autres, mais ce chemin de pierres et de ronces, je ne saurais l'indiquer à qui ne s'y engage pas lui-même. Ils font ce qu'ils<br /> veulent. Mais ça par contre, il m'arrive de le rappeler ;)<br /> <br /> <br />
B
<br /> <br /> <br /> <br /> De tous temps j'ai eu cette sensibilité exacerbée, à fleur de peau... Arrivée a l'université je m'étais dit qu'il était temps de regarder le 20h (mes parents n’étant plus les fournisseurs officiels d’info et notamment parce qu’étant en première année d'éco ou je me devais impérativement de me documenter en temps réel)... Et soir après soir, à force de pleurer toutes les larmes de mon corps, j'ai décidé d'arrêter… Depuis j'écoute la radio, il m'arrive encore de pleurer surtout en écoutant la bas si j'y suis... Mais je reste égoïstement retranchée dans mon petit monde… Je n'ai pas encore pensé comment informer mes enfants… Je veux garder cette bulle de savon pleine de beauté, de sérénité, qui les entoure aussi longtemps qu’il le sera possible…
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C
Je comprend. C'est difficile de protéger un enfant et de se demander jusqu'où est-ce qu'on doit/peut l'informer. Les images sont très violentes, plus, à mon sens, que les mots.Petite, j'avais entendu parler par mes parents, en termes vagues, de la Shoah. Ils m'avaient expliqué qu'Hitler était un "président allemand" qui avait décidé que les gens "blonds aux yeux bleus et à la peau claire" étaient les seuls qu'il fallait garder et qu'il fallait tuer les autres. Comment ? "Oh, de pleins de façons, ça dépend, on ne sait pas toujours".Ok.Mais quel traumatisme le jour où je suis tombée par hasard sur un livre de photos de la Shoah, recueil d'images de charniers, de corps décharnés et de tas de cheveux, chaussures et dents en or ...
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C
Et le regard des enfants nous rappellent qu'il est des natures auxquelles on ne peut s'habituer...
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