ne me parle pas de ça, tu vas gâcher mon repas
Il y a quelques jours OB a "mangé" un article où j'annonçais ici ma décision de devenir végétarienne. Un pas qui s'est formé tout seul, après avoir réduit peu à peu ma consommation de viande et de poisson jusqu'à ce qu'elle ne soit plus que symbolique. Pour continuer à être bien gentille à la table de ceux qui m'invitent. Pour ne pas me compliquer la cuisine : je ne cherche pas à imposer à l'Homme ni à Mamzelle ma façon de voir les choses.
Pour mon entourage, j'ai décidé de ne pas répondre aux sarcasmes et propos condescendants, ni aux attaques quelles qu'elles soient. Par contre les questions, j'y répondrai.
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Comment cette idée a-t-elle germé en moi ?
Par des considérations d'ordre écologique (justesse de la répartition des ressources alimentaires).
Il y a bien eu un déclic entre le "viande ou poisson de temps en temps" et le "plus jamais, c'est fini" ?
Oui, c'était un film documentaire sur le gavage des canards gras. Par extension, j'ai compris, intégré, la souffrance des animaux élevés pour être tués et mangés, d'autant plus lorsqu'ils proviennent d'élevages intensifs. Au-delà de sa cruauté infinie, j'ai touché du doigt l'absurdité de la situation. J'estime, en mon âme et conscience, qu'on n'a pas à faire cela. Que rien ne le justifie.
Oui mais au niveau de mon corps, de ces habitudes alimentaires prises dès l'enfance, au niveau de toutes ces cellules qui me composent et qui sont issues pour des millions d'entre elles de nutriments animaux ?
J'ai pris conscience de certaines notions d'hygiène. D'hygiène alimentaire tout d'abord : il est indéniable que je digère mieux les produits non carnés et non issus de laits animaux. D'hygiène tout court d'ailleurs : voir le lien en fin de page, les conditions d'abattage sont expliquées en images. Horreur.
Pourquoi est-ce que je ne continue pas de fermer les yeux et le coeur à toutes ces souffrances, ça doit être terrible de vivre dans ma peau, une véritable torture, je ne puis tout de même pas supporter tous les malheurs de la terre !?
Parce que j'ai le bonheur désespéré d'être là. Parce que je suis un être doué de raison et de sensibilité, parce que je peux ouvrir les yeux sans risquer de sombrer, parce que le simple fait de les ouvrir sur ce que l'on nous cache, peut justement nous sauver.
Je ne suis ni masochiste ni torturée. Par contre je ne veux pas vivre comme un de ces animaux en batterie que l'on empêche d'utiliser les capacités liées à son espèce. Je suis un être pensant, aussi libre qu'il puisse l'être dans sa condition d'humain, et je compte bien vivre debout. Et je sais que ce que nos vies tissent aujourd'hui constitue l'Histoire dont nos enfants supporteront le poids. A partir du moment où ma conscience s'est éveillée, je suis devenue responsable.
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Aussi, j'ai occupé le temps de sieste de Mamzelle devant cette vidéo. Etouffant mes cris et mes sanglots, me cramponnant à ma chaise, mordant mon poing.
Merci à Angèle de l'avoir relayée.
J'ai un goût amer et métallique sur la langue maintenant.
Pourquoi est-ce que je diffuse ce documentaire ?
Parce qu'il permettra peut-être à d'autres, en montant sur le pont, de savoir. Or le savoir est la clé des choix éclairés. Parce que le visionnage des conséquences de nos actes quotidiens ne devrait jamais être déconseillé aux moins de 16 ans. Je pense qu'on pourrait réserver ça, disons, aux films d'horreur ; pas à un corps de métier, à une branche de l'agriculture, ni à l'origine du contenu de nos assiettes.
Parce que ce goût amer et métallique, je le reconnais, c'est celui du sang. Je n'en ai pas que dans la bouche : j'en ai aussi plein les mains.